Le blog d’un chercheur et formateur en histoire de l’art

Le blog d’un chercheur et formateur en histoire de l’art
en Provence… et ailleurs


L’art où, par qui, et comme il s’est fait.
Les articles régulièrement postés ici rendent compte d’une activité de recherche, de publication et de conception d’outils pédagogiques.
Ce blog déroule une vision concrète et sensible de l’histoire de l’art entrevue dans ses relations de proximité avec un territoire, avec des artistes parfois surpris dans leur travail d’atelier.
Une collection de monographies sur des peintres méconnus invite à (re)découvrir un patrimoine parfois insoupçonné en Provence. Des publications et des conférences en communiquent les récentes mises à jour. Des dossiers d’étude à destination des collectivités contribuent à la connaissance, aux décisions de conservation et aux choix de mise en valeur d’œuvres longtemps ignorées voire remisées.
Un ensemble de supports et matériels pédagogiques s’adresse à des publics divers, allant de l’outil de médiation à l’objet de formation.

Patrick Varrot
Formation, recherches et publications en histoire de l'art
Marseille
Pour tout contact: patrick.varrot@wanadoo.fr

jeudi 29 octobre 2020

Documents pédagogiques

Les carnets du patrimoine : une nouvelle édition
L’église Saint-Nicolas


L’Office de Tourisme de Marignane avait lancé la diffusion d’une première série des Carnets du patrimoine en 2016, en collaboration avec l’association des Amis de Marignane et de la Provence et les archives communales. Ces documents proposent une mise à jour de l’histoire et des possibilités de découverte des principaux monuments de la commune accessibles au public. A la suite des trois premières éditions concernant le château des Covet, actuel Hôtel de ville, la chapelle Notre-Dame de Pitié et la maison commune dite « beffroi », s’ajoute à la collection ce double feuillet de visite et de documentation sur l’église paroissiale, objet d’une récente restauration. Diffusé à partir de la mi-septembre 2020, ce quatrième carnet suppléera aux visites publiques des journées du patrimoine et autres événements culturels annulés en raison de la crise sanitaire.

 

Renseignements
Office de Tourisme de Marignane
Cours Mirabeau
13700 Marignane
04 42 31 12 97
officedetourisme@ville-marignane.fr
http://www.tourisme-marignane.com

mercredi 2 septembre 2020

Dossiers d’étude

Du grand jardin à la table : la cuisine au château de Marignane à la Renaissance.
Un recueil de recettes adaptées à partir de l’inventaire du potager de Claude de Tende en 1540.


juillet 2020


Des travaux engagés en 2017 par l’association des Amis de Marignane et de la Provence avaient révélé la composition du grand jardin du château arrenté le 25 mai 1540 par Claude de Savoie-Tende à un marchand de Marseille. Afin de poursuivre et affiner les expériences de projets culturels issus de recherches historiques et scientifiques proposés en 2019 au cours de l’année de la gastronomie en Provence, l’association a souhaité mettre en œuvre cette étude préalable à l’organisation de futurs événements historico gastronomiques.
Trois ingrédients principaux ont été, à ces fins, mis à contribution :
- la localisation et l’identification des productions potagères et agricoles répertoriées dans l’inventaire des biens de la seigneurie en 1540 (complété par d’autres documents d’archives contemporains sur les ressources viticoles et halieutiques),
- l’exploitation des inventaires et descriptifs des pièces de stockage, des lieux de cuisson et des ustensiles de cuisine dressés en 1526, 1529, 1540 et 1555,
- enfin le dépouillement de douze livres ou registres de cuisine connus dans la première moitié du XVIe siècle pour en extraire 197 recettes classées selon les ingrédients issus du grand potager et autre cru des possessions seigneuriales.
Une sélection de 40 d’entre elles a fait l’objet d’une adaptation contemporaine, proposant divers mets plausiblement élaborés dans la « coquina bassa » ou « cosino » et servis à la table du château vers 1540. Le recueil ainsi conçu permettra de cuisiner, à la manière des maîtres queux et officiers de cuisine, les raisins et leurs dérivés (vins, vinaigres, verjus et moûts), les laitues, les courges, les raiforts, les aulx, les fenouils, les poireaux, les pois, les graines de chanvre, les pigeons, les tripes ou « budes », les anguilles, les muges et mulets, les soles, les saupes et les loups.

Renseignements
Association des Amis de Marignane et de la Provence
4 boulevard Frédéric Mistral
04 42 34 87 32
lesamisduvieuxmarignane@orange.fr

dimanche 2 août 2020

Dossiers d’étude

Marignane et son château du XIVe au XVIe siècle d’après les registres de la chambre royale des comptes

Mai 2020

Comme suite aux travaux engagés en 2019 sur les archives parlementaires documentant le château et la seigneurie de Marignane dans leurs états les plus anciens, la ville et sa direction culturelle ont souhaité s’intéresser au fonds du parlement de Provence. Un dossier d’étude a donc été convenu à partir de la sélection de douze documents essentiels sommairement inventoriés au XIXe siècle par l’archiviste du département Louis Blancard. Tous ont fait l’objet d’une transcription, et, pour les pièces rédigées en latin, d’une traduction. Ils couvrent la période la période de 1309 à 1555 et comprennent les serments de fidélité des frères Bertrand et Gilbert de Baux, ainsi que ceux de leur descendant François de Baux enregistrés en 1385 et 1399. Mais les actes les plus scrutés ont été extraits des registres de reconnaissances, précurseurs des cadastres, établis pour Césarie d’Arlatan et Gabriel Valori entre 1440 et 1444, puis Charles du Maine entre 1458 et 1465, enfin pour le président de la cour des comptes en 1526, alors en charge de la gestion d’une seigneurie passée sous mainmise royale. C’est à vrai dire cet ensemble de pièces qui avait attiré l’attention, incluant un inventaire exhaustif des biens féodaux, dont le château encore médiéval, objet d’une inédite description. Il vient compléter une série de baux emphytéotiques accordés en 1519 au nom du roi par une chambre des comptes qui, générait et témoignait ainsi précisément des plus anciennes campagnes d’aménagement des abords du château médiéval à l’aube de la Renaissance. S’ensuivent des contrats d’arrentement des plus précieux pour la connaissance des occupants et acteurs locaux de la vie de la bâtisse et de son domaine, jusqu’au pléthorique rapport d’expertise de 1555.  Dressé dans le cadre du procès introduit au parlement par Françoise de Foix pour demander le remboursement par les caisses royales de tous les travaux de réparation et de transformation,  il propose une visite par le menu et les dimensions de ce qui apparaît, à travers les lignes des maîtres artisans sollicités, comme une véritable résidence aristocratique du XVIe siècle. La documentation semble désormais assez complète pour proposer un premier plan du château médiéval, ainsi qu’une configuration de la nouvelle bâtisse renaissante. Et au-delà, un portrait de plus en plus net du domaine et du terroir, en commençant par la découverte d’une « antique muscatelle » à l’origine du grand jardin ou « viridarium » seigneurial, déjà pourvu d’un colombier. Au registre des aménagements urbains, plusieurs données sont venues éclairer les rapports des interventions d’archéologie préventive de 2010, comme la localisation et la description assez précise des fosses de la ville, peu à peu couvertes d’une ceinture de jardins, ainsi que l’existence d’une « porte fausse » ouvrant le rempart à la vue du château, jusqu’à présent totalement ignorée. Enfin sont apparues les origines des « appartements neufs » du château aménagés sous Jean-Baptiste II de Covet au Grand Siècle, sur une ancienne « antiplace » prolongée par un « plan del foris » occupé par le palais moderne orienté vers le parc en lequel a été converti l’ancien « viridarium ». Au travers de toutes ces étapes suivies par la plume de notaires, conseillers ou maîtres rationaux, s’est révélée l’ossature du château des Covet, déjà orienté vers le sud-est et sa basse-cour devenue cour d’honneur dès le XVIe siècle (on y découvre une nouvelle entrée traitée en arc de triomphe). Le monument marquera celui de cette famille de marchands dès les premières années du XVIIe siècle. Mais les documents antérieurs ici convoqués font déjà état de l’arrivée massive de cette classe de rentiers, ainsi que la montée en puissance de nouveaux notables acquéreurs et bâtisseurs au siècle précédent.

Soucieuse de rendre accessible le dossier aux publics et aux chercheurs, la direction des affaires culturelles en a fait déposer un exemplaire aux archives communales, consultable sur demande.

 
Renseignements :
Direction des affaires culturelles de la ville de Marignane
53 avenue Jean Mermoz – 13700 Marignane
04 42 31 12 42

Archives municipales de Marignane
Bibliothèque Jean d’Ormesson
Avenue de Figueras - 13700 Marignane
04 42 31 12 40

Matériels pédagogiques : métiers, savoir-faire et techniques artistiques

L’atelier du peintre

Un ensemble d’artefacts pour le musée du Petit Palais d’Avignon


Dans le cadre de la préparation de l’exposition parcours « L’atelier du peintre », la conservation du musée du Petit Palais a souhaité concevoir une salle introductive aux œuvres, dédiée au « Peintre au travail ». Six modules garniront ainsi les vitrines de cette première étape d’un parcours consacré à la vie et aux pratiques des ateliers de peintres en Italie du XIVe au XVIe siècle.

Un ensemble d’artefacts permettra donc d’appréhender de manière concrète les techniques, procédés, matières et produits mis en œuvre sur les chantiers de décors muraux et sur les panneaux de bois comme principaux supports de la peinture de chevalet. Quand elles sont nécessaires à la compréhension, les phases de travail imperceptibles sur les œuvres finies ont été rendues visibles par des séquences volontairement inachevées ou des juxtapositions de matières premières et de produits transformés.

Le base de ce travail reste les témoignage des artistes eux-mêmes, collectés à travers leurs traités et manuels, ainsi que les résultats des examens et analyses préalables à la restauration de certaines de leurs œuvres.

S’enchaînera ainsi la découverte du support de peinture murale, du support de peinture sur panneau, des procédés de report du dessin, des outils du dessin et de la peinture, des techniques d’ornement et de dorure, la composition d’une couche picturale.

Parmi les réalisations à voir, cohabiteront un panneau enduit et peint à fresque sur plaque de brique, un échantillonnage chaux aérienne en roches, de calcaire en roches avant cuisson, de marbre et travertin, de sables des trois couleurs catégorisées depuis l’antiquité pour les enduits.

Aux côtés d’un panneau de bois de peuplier encollé, entoilé et enduit, se déploieront une pièce de toile de lin, un échantillonnage de gypse de Bologne, de gypse en roches avant cuisson, de Colle de peau et colle de parchemin en blocs, de rognures de peaux et parchemins crues, puis cuites, une pierre ponce volcanique, un demi os de seiche, un bouchon confectionné en tiges de prêle, le tout employé au ponçage des panneaux.

Au registre de la préparation graphique de l’œuvre peinte dialogueront un poncif de papier chiffon tracé à la pierre noire, une aiguille de fer montée sur fuseau de bois, un spolvero de toile de lin rempli de poudre de charbon, un patron de papier chiffon tracé à la pierre noire passé au charbon au revers, un stylet de bois de buis, un patron de papier chiffon ciré, un pochoir de parchemin huilé, et un panneau de bois de peuplier mis en œuvre selon les techniques de report ainsi évoquées.

Tout l’attirail, fabriqué, monté par éléments ou simplement utilisé par l’atelier mettra en évidence une véritable économie de l’outillage au travers un stylet d’os, des bâtonnets de saule coupés, écorcés et liés au fil de laiton, les charbons obtenus après carbonisation, la pierre noire brute et façonné en crayon, une brosse de soies de porc montée comme au moyen âge, un pinceau moyen de soies de porc, un pinceau fin de petit gris, le tout procédant d’un assemblage de hampes de bois, tuyaux de plumes d’aigle, d’oie, de poule ou de pigeon, soies de porc blanc, poils de queue de petit gris, fils de lin ou de soie cirés.

Mis en œuvre pour les ornements, se rapprocheront bol d’Arménie, feuilles d’or et d’argent, motif ornemental découpé dans une feuille d’étain dorée à la feuille, motif ornemental découpé dans une feuille d’étain dorée à l’aloès et au safran, d’après une recette de « liqueur à dorer » reconstituée aux côtés de ses ingrédients, huile de lin, sandaraque, aloès et safran. Un coussinet de doreur voisinera avec une palette à dorer de petit gris, une patte de lièvre, un brunissoir d’agate, une dent de sanglier et un poinçon ornemental à motif floral.

Les méthodes d’obtention des liants protéiniques composant la couche picturale se comprendront à travers une éponge de mer, un fouet de bruyère, un filtre conique de toile de lin, des taillures de figuier. Huile de lin crue, clarifiée, cuite, huile de noix, gomme arabique, gomme adragante et véritable colle d’esturgeon complèteront la gamme. Une collection de 33 pigments historiques sera volontairement parasitée par certaines matières premières ou petits dispositifs détaillant les procédés d’obtention les plus courants (lames de métaux oxydées, os blanchis et calcinés, comme les sarments, teintures travaillées en laques, comme celles du safran, de la gaude, de l’indigo, de la guède ou du folium). Quelques incursions minéralogiques ponctueront le module, à travers des blocs d’azurite, de céladonite, chrysocolle, cinabre, hématite, lapis-lazuli, malachite, ocre brun, ocre jaune, orpiment, pierre noire et de réalgar.

Enfin, un choix de composants de vernis (huiles de lin et de noix, sandaraque, mastic, colophane, térébenthine de Venise, térébenthine de Strasbourg) évoquera les effluves saturant l’atelier à l’achèvement des peintures, expérience qui sera d’ailleurs discrètement proposée à travers un boîtier olfactif posé en « hors d’œuvre », invitant à ensuite à en découvrir celles de la collection, avec un autre regard.

 

L’ensemble sera scénographié par l’agence Saluces habituellement sollicitée pour les expositions du musée, et devrait accompagner la présentation des collections permanentes à l’issue de l’exposition.

Renseignements
Musée du Petit Palais
Palais des Archevêques – Place du Palais des Papes
84000 AVIGNON
04 90 86 44 58

jeudi 9 juillet 2020

Monographies : peintres méconnus en Provence

Joseph Rougier (1712-1787) et Joseph Amalbert (1749-1796).

Entre Sainte-Victoire et Sainte-Baume, deux hauts lieux d’inspiration artistique et de dévotion spirituelle, s’articule un territoire a priori propice à l’exercice pictural. Trets et ses environs ont ainsi vu naître et travailler Joseph Rougier. Né en 1712 d’une mère originaire d’Apt et d’un père consul et bourgeois, il a été porté sur les fonts baptismaux par Pierre-Joseph de Haitze, célèbre historien d’Aix et de la Provence, et surtout connaisseur et admirateur de la peinture de Jean Daret. Aussi allait-il embrasser une carrière à la fois administrative et artistique, comme contrôleur des actes et peintre. Ce « sieur Rougier », ponctuant les notes éparses, les relevés et quelques publications d’érudits et archivistes du XIXe siècle, vient donc nous interroger sur le métier et le statut de peintre entre la grande peste de 1720 et la Révolution, bref dans la seconde moitié du XVIIIe siècle à l’écart des grands centres et foyers urbains. A la croisée d’une délectation et d’une excellence imposées par le Grand siècle, d’une esthétique et d’un académisme mûris au siècle des Lumières, il nous laisse des œuvres empreintes de l’héritage de Michel Serre, probablement de Pierre Veyrier, indirectement du Romain Carlo Maratta, et tournées vers les propositions nouvelles des Van Loo. Sous son pinceau la grandiloquence du baroque se dissout donc dans les raffinements d’un rococo qui va rapidement s’imposer. Aux côtés de son beau-fils Joseph Amalbert, encore mal connu, et d’un hypothétique collaborateur encore non identifié, il prend la tête d’un atelier livrant grands tableaux de retables, parfois surpeuplés devant d’emphatiques decora, portraits officiels et ex-voto visiblement confiés aux apprentis et successeurs : une multiplicité et une organisation déjà à l’œuvre sur les chevalets d'autres dynasties provençales récemment mises en lumière. Un catalogue de trente numéros se clôt ainsi par une toile que tout semble dater des années 1792-1793, et donc confronter à la très controversée question de la peinture d’histoire religieuse à l’orée, voire à l’époque même de la Terreur. Un cheminement historique que vient alimenter une collecte de documents, intégralement transcrits pour certains, et un état des lieux de la vie artistique entre Aix, Marseille et Toulon, à la rencontre d’acteurs assez peu connus comme Louis Griosel, André Chaix, Etienne Velin, Georges-Agricol Marron, et le Marseillais Honoré Mercurin à qui sont ici rendues les spectaculaires tapisseries peintes de la prud’homie de pêche de La Ciotat. C’est aussi une promenade en Basse-Provence que vient proposer cette redécouverte, reliant Trets à Lançon, Puyloubier, Auriol, Roquevaire, Gémenos, La Ciotat, Hyères, Saint-Zacharie, Rians, La Roquebrussanne, Cotignac, et peut-être à l’arsenal de Marseille dans les premières années de l’école académique de dessin.
 
Joseph Rougier et Joseph Amalbert : Peintres bourgeois de Trets au XVIIIe siècle. Vie et œuvres d’un atelier familial entre pays d’Aix et Basse-Provence
Juin 2020
109 pages, 20 x 28,7 cm, reliure spirale
136 illustrations couleurs et noir et blanc.


vendredi 10 janvier 2020

Dossiers d’étude

Le château et le domaine de La Colle Noire d’après les papiers des familles Poulle et Reibaud. Dossier d’étude sur une partie du fonds Louis Jourdan conservé aux Archives départementales des Alpes-Maritimes.

Novembre 2019

Quelques mois après la disparition de Christian Dior, le romancier et critique d'art Paul Guth consacrait en 1958 un article à son château de La Colle Noire récemment (et profondément) rénové. « Avant tout il voulut donner l'impression qu'on avait habité là, sans arrêt, depuis le XVIIIe siècle et que chaque propriétaire, au gré de son humeur et des modes de son temps, avait effectué telle ou telle modification ». Ces quelques indications lui ont de toute évidence été données par l'architecte André Svetchine qui a procédé à la métamorphose architecturale des lieux englobant une mystérieuse « tour » datée du XVe siècle faute de documentation historique. Entre décembre 2018 et mars 2019 était mise en œuvre une étude sur le tableau, le décor et le mobilier de la chapelle Saint-Barthélemy, satellite volontairement détaché du domaine de La Colle Noire par Christian Dior en 1953. Selon la même démarche et les mêmes méthodes, Guillaume Garcia-Moreau, responsable du site patrimonial, a souhaité poursuivre les travaux d'une recherche historique sur ledit domaine et son château acquis par les Parfums Christian Dior en 2013. Fondée sur le dépouillement des sources archivistiques, leur confrontation à des connaissances pluridisciplinaires et à un patrimoine monumental et artistique, bref matériel, elle s'intéresse dans ce volet à la personne d'Henri-Emmanuel Poulle, considéré comme fondateur, à l'exact milieu du XIXe siècle, de « La Colle Noire ». L'histoire de la propriété de cet avocat, député et conseiller général, lui ressemblait, somme toute. Du moins d'après la seule image que pouvait générer la trame de ses biographies officielles. Les quelques publications sur les origines de cette résidence de campagne, n'en ont, de ce fait et jusqu'à présent, retenu qu'une histoire très administrative, juridique et notariale. Elle se résume pour l'essentiel à la succession de ses propriétaires et à un état cadastral figé dans le temps. Ce temps demeure en l'occurrence celui des géomètres et des percepteurs, court et cerné entre 1839 et 1840, avec quelques fébriles mouvements de curseur enregistrant des évolutions légales et fiscales déclarées en 1850 et 1861, pour des modifications finalement assez mal identifiées… toujours faute de documentation historique. L'intuition de Christian Dior ne pouvait-elle cependant trouver meilleure confirmation ? On a pourtant bien, pour la période concernée, « habité là, sans arrêt », et le propriétaire y a bien procédé à des modifications « au gré de son humeur et des modes de son temps », à quelques restrictions près. En 2016 était exploité un des dossiers du fonds Louis Jourdan versé aux Archives départementales des Alpes-Maritimes par l'époux d'une arrière-petite-fille d'Henri-Emmanuel Poulle. Par son intitulé focalisé sur « La Colle Noire », le « 8 J 416 » a été repéré dans l'inventaire de ces archives familiales publié en 1992, mais côtoie en réalité cinquante-deux autres articles aux noms de personnes en lien avec le domaine, comme la dame Ravanas, épouse dudit Poulle, Pauline Poulle épouse Reibaud, leur fille, et Félix Reibaud, leur gendre antibois pour ne citer que les propriétaires. Apparaîtront au fil du dépouillement Ferdinand et Félix Poulle, frères du principal concerné et véritables chevilles ouvrières oubliées de celle qu'on ne dénomme que « La Colle » jusqu'aux environs de 1850, mais aussi des parents, des alliés, des amis, des proches, des fermiers au sens premier du terme, des artisans, des maîtres d'ouvrage, un architecte… Ainsi, les cinquante-trois dossiers, soit le mètre et demi linéaire d'archives concernant les familles Poulle et Reibaud, se sont-ils avérés gisement de matière première pour l'histoire de La Colle Noire comme création paysagère, architecturale, et cadre d'une vie saisie dans ses moindres détails et sa quotidienneté, à travers cent trente documents transcrits en annexe de l’étude. Au fil des pages et des pièces extraites du fonds Louis Jourdan, se sont révélées les grandes heures de La Colle Noire sous la plume de son fondateur. Au détour d'une note est apparu un « colombier central », point de départ de l'identification du noyau de la bâtisse originelle, puis de la localisation d’un relais de poste déjà bien connu. A la faveur d'un modeste pense-bête a émergé le premier « cabinet » comme pièce de la première maison nouvellement construite en 1850, logiquement suivie de la seconde venue la prolonger pour constituer le nouveau château ou fier « castel » couronné de ses deux pavillons. Ses principales pièces et satellites ont pu être identifiés dans leur fonction originelle. Plusieurs sources d’inspiration évoquées par le propriétaire lui-même dans ses papiers personnels (faisant part de visites, prises de notes précises) puisent à des modèles aixois, varois, et même d’autres provinces insoupçonnées, aristocratiques comme ruraux. Enfin, au registre des avancées de la connaissance figurent les noms des constructeurs, artisans et architecte d'une partie de La Colle Noire. Cette démarche s'est également appliquée au paysage du domaine et à une partie de la collection d’œuvres d’art constituée par Poulle entre Aix, Draguignan et Montauroux.
 
Dossier actuellement réservé à la communication interne de la société des Parfums Christian Dior.