Joseph Rougier (1712-1787) et Joseph Amalbert (1749-1796).
Entre
Sainte-Victoire et Sainte-Baume, deux hauts lieux d’inspiration artistique et
de dévotion spirituelle, s’articule un territoire a priori propice à l’exercice
pictural. Trets et ses environs ont ainsi vu naître et travailler Joseph
Rougier. Né en 1712 d’une mère originaire d’Apt et d’un père consul et
bourgeois, il a été porté sur les fonts baptismaux par Pierre-Joseph de Haitze,
célèbre historien d’Aix et de la Provence, et surtout connaisseur et admirateur
de la peinture de Jean Daret. Aussi allait-il embrasser une carrière à la fois
administrative et artistique, comme contrôleur des actes et peintre. Ce
« sieur Rougier », ponctuant les notes éparses, les relevés et
quelques publications d’érudits et archivistes du XIXe siècle, vient donc nous
interroger sur le métier et le statut de peintre entre la grande peste de 1720
et la Révolution, bref dans la seconde moitié du XVIIIe siècle à l’écart des
grands centres et foyers urbains. A la croisée d’une délectation et d’une
excellence imposées par le Grand siècle, d’une esthétique et d’un académisme
mûris au siècle des Lumières, il nous laisse des œuvres empreintes de
l’héritage de Michel Serre, probablement de Pierre Veyrier, indirectement du
Romain Carlo Maratta, et tournées vers les propositions nouvelles des Van Loo.
Sous son pinceau la grandiloquence du baroque se dissout donc dans les
raffinements d’un rococo qui va rapidement s’imposer. Aux côtés de son
beau-fils Joseph Amalbert, encore mal connu, et d’un hypothétique collaborateur
encore non identifié, il prend la tête d’un atelier livrant grands tableaux de
retables, parfois surpeuplés devant d’emphatiques decora, portraits officiels
et ex-voto visiblement confiés aux apprentis et successeurs : une
multiplicité et une organisation déjà à l’œuvre sur les chevalets d'autres
dynasties provençales récemment mises en lumière. Un catalogue de trente
numéros se clôt ainsi par une toile que tout semble dater des années 1792-1793,
et donc confronter à la très controversée question de la peinture d’histoire
religieuse à l’orée, voire à l’époque même de la Terreur. Un cheminement
historique que vient alimenter une collecte de documents, intégralement
transcrits pour certains, et un état des lieux de la vie artistique entre Aix,
Marseille et Toulon, à la rencontre d’acteurs assez peu connus comme Louis
Griosel, André Chaix, Etienne Velin, Georges-Agricol Marron, et le Marseillais
Honoré Mercurin à qui sont ici rendues les spectaculaires tapisseries peintes
de la prud’homie de pêche de La Ciotat. C’est aussi une promenade en
Basse-Provence que vient proposer cette redécouverte, reliant Trets à Lançon,
Puyloubier, Auriol, Roquevaire, Gémenos, La Ciotat, Hyères, Saint-Zacharie,
Rians, La Roquebrussanne, Cotignac, et peut-être à l’arsenal de Marseille dans
les premières années de l’école académique de dessin.
Joseph
Rougier et Joseph Amalbert : Peintres bourgeois de Trets au XVIIIe siècle.
Vie et œuvres d’un atelier familial entre pays d’Aix et Basse-Provence
Juin
2020
109
pages, 20 x 28,7 cm, reliure spirale
136
illustrations couleurs et noir et blanc.